Les massacres de 1391

barcelone massacre

Par Didier Nebot

Tout commença au printemps de l’année 1391, où la Juderia de Séville fut attaquée par des chrétiens, rendus fous furieux par les discours de haine et de mort de l’archidiacre don Hernando Martinez. On y dénombra 4000 morts. Haranguée par quelques meneurs fanatiques et enragés, la foule mit à feu et à sang tout ce qui bougeait dans les quartiers juifs. Puis la fièvre gagna toute l’Espagne et les juderias (quartier juif des villes espagnoles) de la plupart des villes de la péninsule ibérique subirent massacres et conversions forcées.

À Barcelone le carnage fut total. Durant 3 jours et trois nuits, la foule se glissa dans tous les recoins de la vaste Juderia, tuant, brûlant, saccageant. Puis ce furent des hordes de brigands, attirés par les flammes immenses qui ensanglantèrent la nuit. Ils s’abattirent sur la ville, les Barcelonais, fatigués, leur avaient abandonné la place. Les rescapés, terrorisés, coururent se réfugier derrière les hautes murailles du Castillo Nuevo. Mais la forteresse tomba aux mains des assaillants, qui exterminèrent hommes, femmes et enfants. Le samedi 5 août 1391, les fils d’Israël avaient été assassinés jusqu’au dernier dans Barcelone la fière. Devant l’ampleur des massacres, le gaon de Castille, chef spirituel des Hébreux, demanda protection à la reine, donna Leonora et lui proposa, même, une forte somme d’argent. La souveraine refusa, déclarant que” jamais elle ne demanderait aucun service à ce peuple, pour qu’il n’eut pas à la maudire en silence.”

Dans toute l’Espagne l’espoir de survivre portait un nom: La conversion. Les esprits ne s’apaisèrent véritablement qu’à l’automne. Les grandes juiveries, zones tranquilles des faubourgs, n’existaient plus. Beaucoup de villages par contre se virent grossir de familles juives, converties ou non, qui espéraient trouver dans l’isolement un répit pour leurs enfants. La vie repris son cours.

Le Gaon de Castille, après sa tentative infructueuse auprès de la reine, se tourna vers le conseil de régence, composé de nobles et hauts dignitaires de l’église. Le chef des Hébreux leur parla, d’une voix éteinte, de ce qui n’avait pu être empêché. Les membres du Conseil, désireux peut-être de se débarrasser et du vieil homme et d’un point noir dans leur conscience, promirent que les assassins seraient recherchés et châtiés. On en parla dans les couloirs du pouvoir, on oublia très vite. Comment punir des milliers de coupables? Dialogue de sourds.

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