Lorsqu’en 1454 le roi Juan II mourut

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Par Didier Nebot

Lorsqu’en 1454 le roi Juan II mourut, l’inquiétude grandit parmi les Juifs.

On se posa mille questions: son fils, Henrique IV, se montrerait-il aussi bienveillant? L’on s’était habitué à vivre sans les vieux démons de la crainte et de l’humiliation. Faudrait-il rendosser l’ancien manteau ?

Mais Henrique IV semblait dépourvu de caractère. Ce fut une période de vaste corruption, de luttes internes à la cour, de détournements d’impôts et même d’assassinats parmi les puissants. Très vite les affaires déclinèrent. L’Espagne s’appauvrissait. Le pays était au bord du gouffre. La vie était chère, les rouages de l’économie complètement désorganisés. À force de mise à sac et de confiscation, les entreprises, en grande partie contrôlées par les Hébreux, étaient devenues moribondes. L’industrie et le commerce chancelaient et le pouvoir en place ne  contrôlait plus rien. L’anarchie régnait.

Enrique Caurto de Castilla

L’Espagne était décadente. Elle ne pensait plus à la reconquête des territoires qu’occupaient les Sarrazins, là-bas, dans le petit royaume de Grenade. Les nobles perdaient leur temps à guerroyer entre eux au lieu de s’unir pour chasser l’ennemi. Le roi Henrique IV n’avait pas la compétence et la personnalité de son père Juan II. À la cour il n’était pas respecté, tous n’aspiraient qu’à sa perte.

L’infante Isabelle, sa demi-sœur, faisait par contre l’unanimité. Son charisme et sa dévotion étaient tels que la majorité des grands d’Espagne avait reconnu son autorité.

Un groupe d’officiers sollicita un jour auprès d’elle une entrevue. “Princesse, la situation est catastrophique. Le roi ne gouverne plus et le peuple est prêt à la révolte. Un mot de vous, et nous vous offrons le trône.”

 “Je vous remercie de votre confiance, mais l’heure n’est pas encore à la réforme. Le roi Henrique est de mon sang et il ne m’appartient ni de le juger ni de le blâmer, encore moins de le renverser. Je suis cependant sensible à vos propos et j’accepterai la couronne lorsque Dieu le décidera.”

 “Puisque tel est votre désir, tel sera le nôtre. Sachez, madame, que toute la noblesse sera derrière vous. Cependant, il est un sujet important dont nous aimerions vous entretenir et qui renforcera notre attachement à votre personne.”

 “Je vous écoute.”

“Il est dans notre pays des hommes et des femmes d’origine juive, devenus chrétiens, qui judaïsent en secret. Il ne nous est pas possible d’accepter de tes faits qui insultent notre Eglise. Le pape, en 1441, par un bref à l’évêque d’Osma, a ordonné la création d’un tribunal spécial pour ce genre de délit, et pourtant le roi a refusé d’entériner cette décision.”

“Je connais ce problème. Torquemada mon confesseur m’en a maintes fois parlé. Il est prêt à se dévouer pour que justice soit faite.”

“L’instauration de cette inquisition est une nécessité pour la sauvegarde de la foi en Espagne. Votre accord est la condition essentielle de notre soutien.”

“Sachez, messieurs, que je partage votre point de vue. Je prendrai, soyez-en persuadés, les mesures nécessaires en temps utile pour que de tels agissements soient châtiés.”

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