Préambule

MI1BD

Par Didier Nebot

En l’an 711, Taarik, le sarrasin, traversa le détroit de Gibraltar. Animés d’une foi et d’une volonté implacable, ses vaillants et intrépides soldats conquirent, en moins de cinq ans, la majeure partie de la péninsule ibérique. Ils fondèrent le Califat de Cordoue, véritable province musulmane indépendante de Bagdad.

Les Wisigoths, balayés et humiliés, n’eurent qu’une seule ressource : se réfugier au fin fond du nord de l’Espagne. Ils créèrent de minuscules états dont la symbolique était la ferveur fanatique pour la religion catholique.

Les juifs, inlassables voyageurs et excellents lettrés, maniant les langues avec dextérité et finesse, devinrent d’habiles interprètes, permettant les échanges, dialogues et contacts entre ces impétueux conquérants musulmans et les rigides petits royaumes visigoths du Nord.

Messagers et traits d’union de deux civilisations, ils s’épanouirent tant au milieu des arabes que des chrétiens. Une ère de calme et de prospérité, qui allait durer plusieurs siècles, permit à la culture juive de s’affirmer et de s’enrichir. Bien sûr, la vie du Peuple du Livre était régulièrement entrecoupée de moments difficiles où massacres et conversions se succédèrent de façon plus ou moins régulière avec plus ou moins de dommages, selon les périodes ou les souverains. Même s’il pliait parfois, ce Peuple à la nuque roide, ne capitulait jamais.

Les Hébreux vivaient dans cette région du monde depuis des temps immémoriaux. Leurs habitudes, leur langue, leurs mœurs étaient ibériques. Le commencement de leur immigration datait du début de l’ère chrétienne et même plus. Rares étaient ceux qui pouvaient se souvenir de leurs ancêtres de Judée.

Attirés par cette douceur de vivre, les juifs de Mésopotamie vinrent augmenter les rangs de leurs frères espagnols. La communauté juive grandit, grossit, prit une importance considérable. Plus du quart des habitants du pays étaient issus de Juda. En 1261 la seule Castille comptait 854961 âmes juives qui payaient en impôts la somme de 25.648.500 maravédis.

Mais l’hégémonie du croissant déclina. Les petits états chrétiens du Nord se regroupèrent et purent reconquérir progressivement une partie du territoire. En 1246, seule Grenade et ses alentours restaient aux mains des arabes.

Après de nombreuses décennies de vie plus ou moins tranquille, l’histoire changea. Les croisades furent le tournant décisif qui marqua la fin du judaïsme heureux. Ces hypothétiques marches pour la délivrance des lieux saints décimèrent de nombreuses communautés juives d’Europe. La maladie, la peste, un décès suspect, une récolte mauvaise, c’était les juifs. Il fallait punir et les chrétiens punirent. C’est à qui assassinerait son « tueur de christ » pour s’ouvrir les portes du paradis.

L’Espagne résista d’abord. Les fils d’Israël étaient trop nombreux, trop forts, trop riches. La population de sang mêlé, depuis tant de siècles, pas assez pure pour chasser l’impur. La chevauchée des croisés atteignit très peu cette contrée de l’Europe. Mais le doute avait été introduit dans les esprits, le vent de la calomnie et de la haine allait bientôt déferler sur l’Espagne.

En1391 ce fut l’orage, le cataclysme, la mort. Tout bascula alors.

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